Crémant, champagne, Prosecco : comment bien choisir ces vins pétillants pour vos menus de fêtes ?

"L’inflation et l’augmentation galopante des prix du champagne font la par belle aux autres pétillants, affirme Renaud Guerre-Genton, chef de Groupe vins de Système U. Après le phénomène prosecco, l’engouement pour les crémants AOC va crescendo." Déniché chez les cavistes et les vignerons, le pet’nat s’installe sur les cartes des restaurants emprunts de naturalité et de liberté. À la troisième place des boissons alcoolisées les plus dégustées dans l’Hexagone, le champagne - même cher - garde sa superbe. Les Français en pincent pour les bulles. "Normal, deux générations de buveurs de soda boudent le vin, analyse le chroniqueur Antoine Gerbelle*, lui préférant le plaisir d’une boisson glacée, fraîche, gazeuse, que l’on met au frigo et que l’on sert avec facilité."

* On va déguster de François-Régis Gaudry, sur France Inter.

Le vin pétillant naturel à la cote !

Au cœur de la mouvance des vins nature (3% de la consommation de vin), le pet’nat brille. "C’est la chose la plus simple à faire : macération des raisins, levures indigènes, fermentation longue dans ma cave troglodyte et sucres résiduels", avoue avec modestie Ariane Lesné, vigneronne du Domaine de Montrieux, près de Vendôme dans la Loire. "J’ai la chance de travailler un cépage endémique de la région, le pineau d’aunis, mais aussi des gamays et du chenin. Son pétillant nommé Phylactère (un assemblage de trois gamays dont un teinturier) a le goût, dit-elle, d’une limonade pour les adultes. Le plaisir et l’aspect ludique l’emportent sur les conventions". "Leurs défauts deviennent leurs qualités. Les amateurs aiment leur côté brouillon qui ne donne pas mal à la tête", enchaîne Antoine Gerbelle. Leurs prix abordables réservent des saveurs surprenantes et chaque bouteille est une pièce unique, à dénicher chez les vignerons ou chez les cavistes libres…

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Prosecco et cava, les pétillants méditerranéens

Adulé depuis la mode du Spritz, ce vin blanc italien à fines bulles tient sa particularité du Glera, ce cépage blanc utilisé à 85 % et cultivé dans cinq provinces de la Vénétie. Dégusté dans l’année qui suit les vendanges, sa jeunesse transmet fraîcheur et vivacité, surtout choisi brut. Copié et mal copié, l’appellation Denominazione d’Origine Controllata e Garantita (DOCG) et le label bio préservent son authenticité.

Autre délice festif qui s’envole, le cava surnommé le champagne espagnol, car il est issu d’une méthode traditionnelle (seconde fermentation en bouteille) et de trois cépages (marcabe, xarel-lo et parellada.) "C’est un pétillant peu cher dont la qualité dépend de son temps de repos, de sa réalisation de façon artisanale, de préférence en bio, précise Pierre Guigui. Au simple Cava, vieilli 9 mois, on préférera le Cava Reserva (15 mois minimum) et le Cava Gran Reserva qui peut rester jusqu’à 52 mois en élevage sur lies pour augmenter sa rondeur et ses arômes."

Les crémants, les cousins du champagne

Soumis à des cahiers des charges très stricts imposés par l’appellation d’origine contrôlée (AOC), les crémants sont produits selon la méthode champenoise dans huit régions françaises (Alsace, Bourgogne, Loire, Savoie, Jura, Die, Limoux et Bordeaux). Autrefois baptisés mousseux, peu chic, ils séduisent de plus en plus pour leurs petits prix, mais surtout pour leur caractère local. "Les usages du crémant de Bourgogne depuis le XIXème siècle sont uniques car nous faisons des assemblages de raisins produits sur le terroir et sur les lieux dits", explique Pierre du Couedic, directeur délégué de la filière Crémant de Bourgogne.

Sur les huit appellations, chaque type de crémant correspond à un moment de dégustation : apéritif, repas ou dessert. "Il y a de très jolis crémants, d’ailleurs ils coûtent très cher à produire. Les vignerons font de plus en plus d’efforts notamment en Alsace et en Bourgogne", surenchérit le chroniqueur radio et TV. Il privilégie les petits domaines voués à une effervescence plus délicate.

Le champagne, indétrônable !

Avant le bonheur d’entendre sauter son bouchon, il ne s’agit pas de le choisir à l’aveugle sur un linéaire où températures trop élevées et lumière des néons affectent son goût et ses bulles. Grandes maisons ou vignerons ? Ces derniers cultivent 98% des trois cépages principaux du vignoble champenois (chardonnay, pinot noir et pinot meunier) qu’ils revendent aux premiers. "Leur différence, c’est l’émotion, intervient Pierre-Yves Coinjo, œnologue indépendant à Épernay. Les vignerons mettent en avant des choses plus spécifiques, plus originales, plus personnelles. Leurs champagnes sont plus secs, car ils y mettent moins de sucre de canne alors que les grandes maisons aux millions de bouteilles expédiées autour de la Terre composent des cuvées plus consensuelles pour plaire au plus grand nombre." Distinguer le bon du mauvais passe par la qualité de l’effervescence. "Si les bulles ne sont pas fines, ça veut dire que la recette n’a pas été respectée, poursuit-il. Millésimé ou pas ? Quand les grandes maisons achètent leurs raisins un peu partout pour faire des assemblages, les conservent pour les futures cuvées, les vieillissent entre 20 et 36 mois, le champagne est non millésimé et ses arômes seront semblables une année sur l’autre. Les millésimés, réalisés à partir d’un seul cépage d’une unique parcelle vendangée en une seule année et vieillis durant 4 et 5 ans, apportent plus de vinosité et leurs goûts différents chaque année. Quant à leurs cépages, le pinot noir seul ou en assemblage donne un vin plus puissant, plus gras, plus généreux, le chardonnay de la finesse et de la fraîcheur. Le pinot meunier, fragile et pas simple à vinifier, traduit le talent des vignerons".

Parole de vigneron

"Dès 1947, mon père faisait de la bio sans même le savoir. Puis la chimie est passée par là… Quand j’ai pris la cave en 2000, j’ai mis du naturel partout. Il n’y a plus de désherbants, remplacés par des moutons, ni d’insecticides. Les pressoirs aux toits photovoltaïques font de nous la première maison de champagne au carbone neutre. Des soupiraux ouverts ou fermés remplacent l’air glacé des climatisations. Certaines parcelles sont labourées par des chevaux. Si nous avons des millésimes âgés de quinze ans (cuvées Oenothèque), nous faisons un champagne familial à prix accessible, avec presque pas de sulfite, une prise de mousse réalisée en bouteille et un vieillissement de deux à trois ans."
Cuvée Carte d’Or brut, environ 35 €.

Sans actionnaire, sans intrants et sans empreinte carbone, Michel Drappier et ses trois enfants composent à Urville, dans l’Aube, des champagnes abordables et de prestige.

L’avis du sommelier

"Les pétillants naturels sont libres car ils n’ont pas été serrés par les intrants et les sulfites, certifiés bio, biodynamiques ou sans label. Leurs vignerons sont libres aussi d’assembler des cépages blancs et rouges qu’ils font macérer. Dans le Roussillon, le Domaine du Petit Gimios fait des muscats effervescents secs et demi-secs. La notion d’accords est plus large, plus riche. Leur effervescence se fait seule à partir du gaz résiduel de la première fermentation, puis la mise en pression de la seconde. Les bulles sont plus délicates, plus fines, plus vives. Les pétillants naturels ne se cantonnent pas à l’apéritif. Ils accompagnent tous les bons plats sans sensation de sucre, mangé par la fermentation."
geosmine.com

À vingt-huit ans, il est libre Vincent Glaymann, comme ses pet’nats choisis de concert avec le chef Maxime Bouttier du restaurant Géosmine à Paris.

Les suggestions bio de Pierre Guigui

• Le crémant d'Alsace blanc de blancs de Vincent Stoeffler est remarquable. Confectionné dans un vignoble familial, il est issu de chardonnay, pinot blanc et riesling.
10,40 €, vins-stoeffler.com

• Médaillé au concours Amphore 2022, le prosecco Superiore Brut Biologico du Domaine Biancavigna Conegliano Valdobbiadene (DOCG) séduit par sa couleur, ses notes fruitées et sa minéralité.
13,85 €, vins-et-conseils.shop

• Originaire de Catalogne, ce cava Alta Alella-Mirgin Gran Reserva 2017 est constitué à 60% de chardonnay et du cépage local, pansa blanca. Il réjouit les papilles de l’apéritif au dessert.
13,90 €, lepetitballon.com

• Comme il est très difficile de trouver un champagne bio abordable, je recommande la cuvée Esprit Nature H.Blin aux bulles très fines, des arômes de fruit et une belle longueur.
31,90 €, vinatis.fr

Pour aller plus loin

• À lire : Le guide des vins bio 2023 de Pierre Guigui, spécialiste de la filière et créateur du concours Amphore, qui encourage les produits biologiques et en conversion. Un pensum bien pétillant.Guide des vins bio 2023, Pierre Guigui, BBD Éditions, 24,90 €.
• À regarder : la web télé Tellement Soif qui permet d’aller directement chez les vignerons pour affûter ses connaissances et faire les bons choix. Son chef d’orchestre Antoine Gerbelle y partage avec gourmandise ses bonnes adresses.Abonnement mensuel, 5 €, tellementsoif.tv
• À découvrir : Oenologue indépendant et caviste, Pierre-Yves Cainjo propose depuis 2011 plus de 1.500 références de champagne et autres délices.Cave 520, 1 avenue Paul Chandon, Epernay. Catalogue téléchargeable sur le520.fr

Quelques chiffres sur les vins et pétillants

• 37% des Français en pincent pour le champagne, ce qui le place en troisième position des boissons préférées après la bière et le vin.
• 53% des femmes préfèrent les vins pétillants aux vins tranquilles.
• 33% des Français déclarent ne jamais boire de vin (FranceAgrimer).
• 8 sur 10 consomment moins de deux verres par jour (Santé publique France).
• 40 litres de vin par an et par habitant en 2021 contre 120 litres en 1960.

Sources : Baromètre SOWINE/DYNATA 2023, Wine Intelligence.

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